Edmond Baudoin grandit dans un petit village isolé de la France de l’après-guerre. Il consacre la plus grande partie de sa jeunesse à dessiner en compagnie de son frère aîné Piero, qui entrera plus tard dans une école artistique. Les parents n’ayant pas les moyens d’offrir de coûteuses études supérieures à leurs deux fils, Edmond est, lui, dirigé vers une morne carrière d’employé de bureau. Tous ces détails sont relatés avec beaucoup d’authenticité dans ‘Piero’, l’émouvante autobiographie dessinée d’Edmond Baudoin. A la fin des années soixante, les temps commencent pourtant à changer et Baudoin prend la décision de se laisser guider par ses rêves. Les récits de rupture avec des conventions sociales étouffantes jalonneront d’ailleurs sa carrière, de l’album ‘Le Premier Voyage’ au roman ‘Le Procès-Verbal’, classique de l’écrivain Le Clézio qu’il illustre avec passion pour le compte de l’éditeur Gallimard. Baudoin abandonne donc son emploi rémunéré et commence à travailler comme “auteur” de bande dessinée pour de nombreuses revues spécialisées, à travers lesquelles son langage, sensible et extrêmement maîtrisé, accède peu à peu à la reconnaissance. Son premier album, ‘Les Sentiers Cimentés’, publié en 1981, n’est que la première pierre d’une oeuvre très personnelle et en perpétuelle expansion. Les publications de Baudoin font la part belle à un coup de pinceau aventureux et à un noir et blanc très expressif, les lignes de dialogue s’y font rare. L’atmosphère y est suggérée plutôt qu’assénée, économie étant faite de textes ou de dessins trop explicites. Au début des années quatre-vingt-dix, Baudoin rejoint L’Association, maison d’édition indépendante gérée par un collectif de jeunes dessinateurs pour qui il n’est rien moins qu’une légende, l’un des artistes majeurs actuellement en activité.